mardi 20 août 2019

"42", une école d'informatique qui bouscule les codes

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Au cœur de l'été, Paris vit au ralenti. Mais en ce mois d'août, ce n'est pas le cas pour quelques centaines de jeunes gens, entrés dans la troisième semaine d'un marathon pour tenter d'intégrer une école d'un genre nouveau, l'école 42.

Cette école de codage informatique gratuite a été créée par le milliardaire français des télécoms Xavier Niel en 2013 pour aider les jeunes à trouver du travail ou, mieux encore, à devenir leur propre patron. Elle tire son nom du roman "Le guide du voyageur galactique" de Douglas Adam, dans lequel l'ordinateur donne comme réponse à "la grande question de la vie, l'univers et tout" : "42".
L'établissement a connu un succès fulgurant. Environ 40.000 apprentis développeurs postulent chaque année. Mais seuls 3.000 se disputeront le millier de places disponibles, à travers la session de tests de quatre semaines baptisée la "piscine", organisée dans un immeuble ultra-moderne.
Pendant "la piscine", l'immersion est totale : les candidats consacrent de 10 à 16 heures par jour aux épreuves et à des projets. Certains, comme Aristide Rivet-Tissot, dorment et se lavent sur place...
"Ici, tu es tellement immergé que tu oublies parfois que le monde extérieur existe!", dit à l'AFP ce postulant de 19 ans, tout en saluant ses parents venus de province, qui emportent son linge sale.
- Décrocheurs bienvenus -
Lorsque Xavier Niel avait annoncé son projet d'école gratuite, sans enseignants et ouverte aussi aux décrocheurs, 40% des étudiants ne possèdent pas le baccalauréat, la principale fédération des employeurs du secteur des technologies de l'information avait réagi avec circonspection, pointant le nombre d'écoles d'ingénieurs existant déjà.
Six ans plus tard, cet établissement d'autoformation, entièrement basée sur le travail sur projet et l’apprentissage entre pairs, s'enorgueillit d'un taux d’emploi de 100% parmi ses diplômés.
Désormais, Niel, qui a créé le plus grand incubateur de start-up au monde à Paris en 2017, exporte son modèle.
Après avoir fondé une université sœur dans la Silicon Valley en 2016 et entamé différents partenariats en Europe, il vise Rio de Janeiro, Novosibirsk, Tokyo... Le but : 20 écoles partenaires dans 14 pays d'ici à 2020.
- 75.000 emplois non occupés -
L’an dernier, une enquête menée par l’agence française de l'emploi avait révélé plus de 75.000 postes vacants dans le secteur des technologies de l’information. De fait, bon nombre d'étudiants sont démarchés par des chasseurs de tête avant même d'avoir achevé leur cursus, de trois ans en moyenne.
Bastien Botella, 33 ans, cofondateur de Clevy, une start-up qui développe des chatbots, a quitté "42" après seulement le premier tiers de la formation, pour un travail de concepteur de sites internet. Cet ancien directeur d'hôtel, non bachelier, avait précédemment été refusé par plusieurs écoles d'informatique classiques.
"42 a été un tournant dans ma vie", dit celui qui emploie aujourd'hui 21 personnes, dont 6 anciens de "42".
- Le numérique, ascenseur social -
L’approche inclusive est souvent saluée alors que diverses études internationales, notamment Pisa, montrent qu'en France, plus qu'ailleurs, les inégalités sociales pèsent sur les résultats des élèves.
"Le secteur numérique (...) permet l'ascenseur social. Vous avez des personnes d'horizons très, très, variés", souligne la directrice Sophie Viger.
Pendant "la piscine", penchés vers les écrans de 27 pouces les visages sont blancs, noirs, bruns... A l'école 42, il y a aussi des femmes voilées comme Fatia Zementzali, 31 ans, qui explique avoir postulé après avoir été licenciée d'un poste de vendeuse par téléphone parce qu'elle portait un foulard musulman. Ici, elle dit se sentir "accueillie", pas réduite à une image de "femme voilée".
Bien que non reconnu par l'État, le programme avait notamment été salué en 2015 par Emmanuel Macron, alors ministre des Finances : l'école "introduit l’innovation jusque dans l’éducation – c’est ce dont nous avons besoin et c’est formidable !".
Mais elle n’a pas été épargnée par la controverse. En 2017, la presse avait fait état d'accusations de harcèlement sexuel et de misogynie sur le site parisien et plusieurs étudiants avaient été sanctionnés.
Et l'année dernière, la commission nationale Informatique et Liberté l'a fustigée pour une "surveillance vidéo excessive". Un problème réglé, selon Sophie Viger.

Source : l'AFP.

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